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Journal documentaire
20 juin 2017

sur Breivik et 2083 (3/5)

2083 s’ouvre sur un avant-propos de sept pages (3-9) intitulé «About the compendium». L’auteur y annonce les principaux sujets qu’il abordera (la critique de l’idéologie du politiquement correct, qu’il nomme plus souvent marxisme culturel ou multiculturalisme, et la lutte contre la colonisation musulmane de l’Europe, que le multiculturalisme favorise) et donne quelques indications techniques. Il déclare avoir consacré quelque neuf ans à préparer son projet (sans dire que ledit projet doit aboutir à un attentat), dont cinq années à étudier et à accumuler des ressources financières (le jeune surdoué semble avoir exercé son sens des affaires dans le commerce en ligne) et trois passées à temps plein à compiler et à rédiger son «compendium». Il estime y avoir investi 317.000 euros, dont 130.000 versés de sa poche, et 187.500 qu’il considère avoir perdus en arrêtant de travailler pour se vouer à son entreprise spéciale (4, 8. On remarquera régulièrement dans l’ouvrage un penchant pour la quantification (de l’argent, du temps, des matériaux, etc)). J’ai calculé que cela représentait 62500 euros par an, et donc un revenu mensuel supérieur à 5000 euros, ce qui n’est pas invraisemblable. Il dit s’apprêter à envoyer son texte aux quelques milliers de personnes dont il a obtenu l’adresse e-mail par Facebook et déclare que le compendium est sans copyright et peut être reproduit librement. Très au fait des moyens de communication actuels, il appelle ses lecteurs à diffuser son ouvrage sur tous les torrents, blogs, sites, réseaux sociaux et forums possibles, ainsi qu’à le traduire (6). Il précise avoir choisi la forme d’un fichier Word plutôt que d’un pdf car ainsi le fichier est plus léger, plus maniable et plus facilement éditable (mais c’est sous la forme d’un pdf que je l’ai trouvé en ligne) (On le trouve encore facilement en requérant dans Google "2083 pdf"). Il fournit même des conseils détaillés pour lire son texte sur Kindle ou pour l’imprimer par les services de «print on demand», etc (7). Il prévient que l’anglais n’étant que sa seconde langue, il peut y avoir des erreurs dans le texte (il y en a, en effet, même s’il maîtrise la langue remarquablement : on ne trouvera pas là un style recherché, mais une grande clarté d’expression). Breivik signe son avant-propos en présentant de nouveau son nom anglicisé en Andrew Berwick, et en s’attribuant le titre de chevalier templier d’Europe.

L’Introduction au compendium 2083 tient sur 27 pages (11-37) dans lesquelles sont examinés l’histoire et les différents aspects de l’idéologie politiquement correcte qui règne sur les universités, les médias, l’industrie des loisirs et les mentalités en général depuis l’après-deuxième-guerre-mondiale, et plus encore depuis les années 60. Pour qualifier cette idéologie, Breivik reprend l’expression de marxisme culturel, désignant un marxisme non plus limité au seul domaine économique mais reconnaissant et privilégiant l’importance du facteur culturel. Cet exposé n’est pas très original, puisque ses éléments peuvent être aisément retrouvés ailleurs, mais il donne un assez bon aperçu des différents courants de pensée englobés dans cette idéologie (relativisme culturel, multiculturalisme, anti-christianisme, racisme inversé, homosexisme, féminisme, théorie du genre, etc) et présente des portraits intellectuels des principaux maîtres à penser de ce mouvement (Gramsci, selon qui il fallait détruire la mentalité chrétienne des ouvriers pour en faire des révolutionnaires, Lukacs, communiste éminent quoique fils de banquier, Reich le freudo-marxiste fou furieux, Fromm, Adorno, Marcuse, et d’autres) dont la plupart se rattachent à l’Ecole dite de Francfort. Il y a vers le début une page bien tournée (12) où l’auteur imagine ce que serait l’effroi d’un homme occidental des années 50, habitué à un climat de sécurité et de courtoisie, s’il se trouvait soudain plongé dans le monde actuel, marqué par la violence, la pornographie, la drogue et la crasse. Il y a çà et là de bons mots, peut-être originaux, comme cette observation que bien des campus sont devenus «de petites Corées du Nord couvertes de lierre» (14). Sur ces questions de civilisation, je me sens moins conservateur qu’AB, parce que tout en déplorant l’entreprise de démolition systématique de la culture traditionnelle par le marxisme culturel, je reconnais la légitimité de la critique. Le problème étant que la critique marxiste-culturelle tend à s’imposer comme elle-même incriticable, comme une idéologie qui n’admet pas que la remise en cause puisse à son tour être remise en cause.

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