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Journal documentaire
3 juin 2006

Noté en lisant un livre sur le goulag.

J'ai fini de lire le Que sais-je? (décidément, ça doit être au moins le quatrième depuis le début de l'année), le Que sais-je?, donc, de Jean-Jacques Marie, sur Le goulag (numéro 3444, paru en 1999). Pour une somme modique, cet ouvrage offre une vue schématique, mais bien gerbante, sur la nuit et le brouillard communistes. Les principaux points qui ont retenu mon attention sont les suivants :
* Je suis habitué à considérer que les persécutions communistes furent à bien des égards comparables aux persécutions nazies, mais j'apprends ici (p 13 & 62) qu'il existe en outre une coïncidence lexicale troublante : la deuxième syllabe du mot goulag est bel et bien la première de l'allemand Lager, «camp», abrégé en russe. Bien que les bagnes communistes aient été les prédécesseurs des bagnes nazis, et en quelque sorte leurs précurseurs.
* page 62, cette évocation : «La région [de la Kolyma, à l'extrême nord-est] n'ayant pas de communications terrestres avec le continent, les transports de détenus et de marchandises se font par mer. Pendant les six mois de saison navigable, les bateaux entassent dans leurs cales de 4000 à 6000 détenus, interdits de pont par peur d'intriguer un navire étranger. Ecrasés au milieu des excréments, les prisonniers, qui ne peuvent tous recevoir leur nourriture jetée par les trappes, sont décimés pendant la traversée.»
* pages 62-63 une esquisse géographique du goulag réveille dans mon souvenir les noms de lieux effroyables que scandaient The Prophets dans un disque de musique industrielle des années 80 : Magadan, Karaganda, Vorkouta, Norilsk, etc.
* pages 66-67 une série de dispositions légales prises dans les années 30 et 40, parmi lesquelles la loi d'août 1932 prévoyant la peine de mort avec confiscation des biens de la famille pour tout auteur de «pillage de la propriété kolkhozienne ou coopérative, c'est-à-dire vol de quelques kilos de légumes ou de pommes de terre» ; l'installation en 1934 par le NKVD de commissions spéciales de trois personnes avec «pouvoir de déporter sans jugement toute personne jugée socialement dangereuse» ; la possibilité à partir d'avril 1935 d'appliquer la peine de mort aux mineurs à partir de 12 ans ; le décret d'août 1940 punissant le retard au travail supérieur à 20 minutes par un à trois ans de camp ; celui de juin 1947 punissant tout vol d'aliment de 5 à 25 ans de camp, etc.
* pages 74-75 une description des conditions matérielles de la détention : travail épuisant, promiscuité, crasse, sous-alimentation, froid, etc.
* page 82 ce détail, que lors de l'offensive allemande en 1942, «à Lvov, le NKVD abat des milliers de détenus qu'il ne peut évacuer».
* pages 88-89, ces précisions sur le sort des militaires qui avaient eu le mauvais goût d'être faits prisonniers par les Allemands, et que l'on soupçonnait naturellement d'être des espions ou des traîtres : «les commandants et instructeurs politiques étaient considérés comme déserteurs et leurs familles arrêtées. Les familles des simples soldats prisonniers étaient privées de toute allocation gouvernementale (Familiale, retraite, etc).» Les prisonniers «libérés» passaient tous par des camps spéciaux de filtrage où ils étaient examinés de près («5347 sont morts au cours d'interrogatoires musclés»).
* pages 119-120, la catastrophe des libérations massives mais improvisées, après la mort de Staline, quand il fut devenu évident que le goulag était certes un excellent moyen de faire régner la terreur, mais par ailleurs une institution ruineuse, coûtant beaucoup plus qu'elle ne rapportait. Par endroits des centaines d'hallucinés furent subitement jetés sur la voie publique et dans les transports en commun, «munis d'un mince pécule, mais aussi de couteaux». «Ici un convoi mixte emmenant des détenus, hommes et femmes mélangés, donne lieu à des viols collectifs, les victimes étant ensuite jetées du train en marche.»
* page 122 ces revendications significatives d'un comité de prisonniers, parmi d'autres, que l'on réduise la journée de travail à dix heures, et que les gardes n'aient plus le droit de tirer arbitrairement sur les détenus...

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