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Journal documentaire
13 décembre 2020

lézard et poissons

En arrivant à la Croix mercredi après-midi, comme il faisait encore assez jour, je suis allé voir l'état de mes seaux, à l'aplomb du toit le long du hangar. Ils étaient presque tous remplis d'eau de pluie et je me suis aperçu qu'au fond de l'un d'eux il y avait un lézard des murailles. Il arrive régulièrement qu'un lézard tombe dans un des seaux et y reste piégé, mais ça n'était jamais arrivé si tard dans l'année. Je l'en tire sans attendre si je m'en aperçois à temps, mais souvent la bestiole est déjà morte, flottant le ventre en l'air. Je ne sais combien de temps ces animaux sont capables de tenir dans l'eau, c'est à dire sans respirer, avant de se noyer. Celui-là en tout cas paraissait bien vivant, fermement campé sur ses quatre pattes au fond du seau vert. C'était un spécimen assez grand pour sa petite espèce, et il paraissait d'autant plus trapu qu'il avait la queue tronquée. Aussitôt j'ai entrepris de vider le seau et le lézard est tombé sur le sol, à cet endroit fait de gravier. Hélas il n'avait plus du tout l'air vivant. Le petit corps restait affalé dans une posture disloquée, totalement immobile. Venait-il de trépasser à cause de l'épuisement, du stress, du froid, ou des trois combinés? Je ne savais que faire, s'il y avait à faire. Songeant que l'animal, s'il n'était déjà mort, mourrait sans doute de froid dans la nuit, je l'ai recouvert du seau renversé. Le seau posé en porte-à-faux laissait passer l'air, permettait une éventuelle échappée, il isolerait relativement l'organisme du froid extérieur et le protègerait des chats. Le lendemain matin je retournai à mes seaux. Je n'osais soulever celui sous lequel j'avais laissé le lézard. J'ai d'abord pris le temps de vider tous les autres de leur eau, que je transvase dans mes réservoirs sous le hangar. Je possède à cet effet une trentaine de cubis de cinq litres, et deux grands tonneaux de deux cents litres. J'y transvase l'eau manuellement en prenant mon temps, j'aime beaucoup ce petit travail qui m'occupe à l'automne et en général les réserves sont pleines avant Noël, c'est encore le cas cette année. Quand est venu le moment de soulever le seau du lézard, j'ai vu qu'il était toujours là et dans la même posture, n'ayant visiblement pas bougé d'un iota depuis la veille. Comme il paraissait décidément mort, je l'ai ramassé avec une petite pelle en métal et je l'ai déposé près de là, sur un tas d'herbes mortes, au pied du mur du hangar. J'ai remarqué en le soulevant que le corps était encore souple, et il m'a semblé qu'au moment où je l'ai jeté sur le tas d'herbe une de ses pattes a marqué un mouvement. Malgré ces faibles signes le reptile était comme mort, totalement immobile, avachi les yeux fermés. Le tas d'herbe était au soleil, ce qui pouvait aider le moribond s'il avait encore une chance de ressusciter. J'ai continué de vaquer à mes occupations tout en surveillant le mouvement de l'ombre, que la rotation du soleil allait bientôt amener à recouvrir cet endroit. Entre autres choses je suis allé examiner le bassin et ses apparents mouvements de population. Le banc de carassins était stabilisé ces dernières années au nombre de cinq, dont quatre poissons vraiment rouges et un blanc décoloré, mais ces temps-ci je ne vois plus que trois rougets. Je ne sais si le quatrième a vraiment disparu ou s'il reste planqué dans la végétation. Quant aux menues gambusies, qui d'habitude affluent en nuée de mendiantes dès qu'on s'approche du bassin, je n'en voyais qu'une, flottant morte à la surface. Une femelle de grande taille, ce qui pour l'espèce veut dire dans les quatre ou cinq centimètres. Les autres, je veux croire qu'elles aussi hibernent dans la masse d'herbes aquatiques. Pour en revenir à mon lézard, comme l'ombre arrivait sur lui, qui ne bougeait toujours pas mais avait maintenant les yeux ouverts, je l'ai emporté pour le déposer cette fois sur une dalle en plein soleil, si tant est que l'on puisse qualifier de plein le pauvre soleil qui se traîne au ras des arbres à dix jours du solstice. Et ça a marché. Repassant au bout d'un moment j'ai vu que le lézard avait trouvé l'énergie de se déplacer d'une dizaine de centimètres. Un peu plus tard il avait disparu. Je ne sais où il est parti, mais il est certain qu'il revenait de loin.

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