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Journal documentaire
7 août 2019

mazarin

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Au printemps j'ai lu un très petit livre, dont le format se prêtait bien au transport en tram, que je pratiquais encore, c'est le Bréviaire des politiciens, du cardinal Mazarin. Ce recueil de pensées est paraît-il une traduction du latin, par un certain François Rosso, publiée chez Arléa en 1997 avec une préface d'Umberto Eco. A vrai dire j'ai failli ne pas lire le mince volume, qui en le feuilletant me rebutait par plusieurs aspects. D'abord parce qu'il est imprégné d'un éloge général du secret, de l'hypocrisie, allant jusqu'à la justification du mensonge et de la fourberie : il faut à tout prix s'instruire d'autrui tout en cachant ce que l'on pense, voire ce que l'on est. Je comprends que cela puisse aider à l'occasion, mais enfin je ne me vois pas en faire une règle de vie, moi plutôt du genre Céline, «J'ai pas l'habitude de ruser, je suis d'un naturel assez simple, j'aime pas les mystères.» Le cynisme de l'auteur va jusqu'à encourager la malveillance : «Les serviteurs de celui dont tu recherches l'amitié, traite-les en amis, tu pourras les acheter plus facilement si tu as besoin un jour qu'ils trahissent leur maître» (p 36) et ce n'est qu'un exemple. En somme il ne faut se préoccuper que de savoir si un acte est profitable ou non, plutôt que s'il est juste ou injuste. Du reste, n'étant pas moi-même un politicien du XVIIe siècle, n'ayant pas à déplacer des troupes ou lever des impôts, j'avais souvent l'impression que ce texte ne s'adressait pas à moi. Par ailleurs il recèle çà et là de pures âneries, qui n'attirent pas la sympathie, ainsi ce conseil, «Méfie-toi des hommes de petite taille, ils sont butés et arrogants» (25). Enfin quelques détails m'ont fait douter de l'authenticité du document : un certain ton, dû peut-être à la traduction, aussi le fait que je n'aie pas réussi à identifier d'éditions anciennes de l'ouvrage, dont l'originale remonterait à 1684, en outre une allusion de la préface, comme quoi ce recueil de pensées ne serait peut-être qu'attribué à l'auteur, tout cela m'a amené à soupçonner qu'il pourrait s'agir d'un faux. Tout de même la bizarrerie de ce bréviaire m'a assez attiré pour le lire en entier. J'ai remarqué au passage ces quelques pensées. «Les gens qui connaissent beaucoup de langues sont souvent malavisés, car leur mémoire est tellement encombrée qu'elle en étouffe leur faculté de jugement» (26) : je n'irais pas jusque là, mais cela me rappelle avoir souvent pensé que 1) plus ou connaît de langues, moins on les connaît bien (qui trop embrasse mal étreint), 2) si nos facultés intellectuelles sont en quantité limitée, la part mobilisée pour connaître plusieurs langues n'est plus disponible pour autre chose. «Si un inférieur t'invite à sa table, accepte et ne te permets aucune critique. Fais preuve envers chacun d'une parfaite courtoisie. Mais, détendu dans la conversation, garde un brin de gravité dans ton maintien» (35) : cela paraît assez juste et délicat. «Tout le monde sait bien que promettre n'est qu'une façon de ne rien donner et de ne se montrer généreux qu'en paroles» (48) : c'est en effet parfois le cas, même si l'on ne peut généraliser. «N'attends jamais qu'on interprète favorablement tes actes ou tes propos. Dis-toi bien que personne en ce monde n'en est capable» (71) : surtout si tu fréquentes Facebook ou Twitter. «Ne méprise pas les dons d'argent, même les plus modiques et, autant que faire se peut, évite les dépenses en général. Pour tes gens et pour toi-même, sois strict sur la nourriture et le pain. Prends garde également à ne pas te laisser voler l'avoine de tes chevaux» (78-79) : sage conseil. Pour ma part les chevaux ne me coûtent pas cher, n'en ayant pas, mais je veille au grain. «Rien dans ce monde n'est jamais tout à fait assuré» (101) : comment mieux dire? «Pour offrir un cadeau ou donner une fête, médite ta stratégie comme si tu partais en guerre» (122) : que de fois j'aurais dû voir les choses ainsi. «Quoi qu'il arrive, cache tes colères : un seul accès de violence nuit plus à ta réputation que toutes tes vertus ne peuvent l'élever» : mmm, c'est en effet à méditer, selon le cas : on peut se discréditer en s'emportant, mais il y a des fois où il faut savoir remettre les pendules à l'heure. Mazarin donne ainsi quelques sujets de méditation. Prochainement j'examinerai plus en détail ses consignes pour le voyage.

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