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Journal documentaire
30 mai 2016

la vie sexuelle de catherine m

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La vie sexuelle de Catherine M, parue voilà quinze ans, mais que je viens seulement de découvrir dans une édition de poche d’occasion, peut étonner à plus d’un titre. D’abord parce qu’il n’est pas commun de consacrer tout un livre à ce genre de confession, c’est un bel exercice de franchise. Ensuite parce que de telles confidences sont plus inattendues, venant de la directrice d’une revue aussi peu folichonne qu’Art Press. Enfin parce que la vie sexuelle en question n’est pas banale, mais il est vrai que si l’on en fait le sujet d’un volume entier, c’est qu’on a de la matière. Quelle vitalité! Catherine Millet a pratiquement tout essayé, tout pratiqué, tout accepté, à tout moment, dans tous les coins, dans toutes les positions et «avec plein de monde» (page 69) : des amants innombrables, successifs ou simultanés, dont pas mal d’inconnus rencontrés lors de vastes orgies, ou de séances d’abattage anonyme en série. Voilà un ouvrage divertissant à lire, hormis quelques passages théoriques assez opaques, auxquels je préfère de brèves réflexions comme cette remarque en passant, à propos de ses masturbations d’adolescente, que «Même lorsqu’on ne vous a rien dit, vous savez d’instinct quelles activités doivent être cachées» (132). Le livre est écrit avec un vocabulaire franc mais varié, dans un style qui me donne la même impression de beauté froide que le corps de l’auteur, en photo sur la couverture, un style sans faute mais pas toujours sans fadeur. Je trouve une certaine grâce à quelques passages, comme le souvenir de la première fois où elle a sucé une bite («c’est peut-être dès ce moment-là que j’ai appris à me sortir de l’embarras en plongeant le visage vers l’entrejambe et en prenant la queue dans ma bouche», 12) ou la scène amusante où elle copule à l’improviste avec deux partenaires, dans la remise d’un musée (172 sq). J’ai quelques points d’accord avec Catherine, par exemple elle aime être prise comme j’aime prendre, en levrette j’avoue (89). Mais si le livre se lit dans l’ensemble sans ennui, je dois dire que le genre de vie qu’il présente me laisse perplexe et ne me fait guère envie. Le libertinage, par exemple : c’est à mes yeux une option tout à fait légitime, mais je pense qu’il faut choisir, vivre en libertin ou vivre en couple, pas les deux à la fois. Comment elle et son mari supportent-ils cette promiscuité, cette volagerie incessante? Elle laisse entendre que ça ne va pas toujours sans mal, et l’on peut s’en douter. Pour ma part je suis bien aise de n’avoir pas à endurer ce genre d’inconfort affectif, sans compter l’aspect hygiénique : coucher à droite et à gauche ne va pas sans risque, mais cette dame ne s’en alarme pas plus que ça et se résigne à constater que la chaude-pisse est «la fatalité partagée de ceux qui baisent beaucoup» (18). Quelle perspective! L’amour à plusieurs, aussi : depuis longtemps il m’est avis qu’en la matière, dès qu’on est trois, on est trop, mais l’auteur au contraire s’en accommode assez volontiers. Et puis il y a chez elle un goût de la souillure, peut-être hérité de la mythologie georges-bataillesque et de l’idéologie soixante-huitarde, qui m’est totalement incompréhensible. Cette joie de la pisse, cette capacité à lécher le cul d’hommes crasseux, etc, avec la conviction de «s’élever au-dessus des préjugés» (161), non, non, non, par pitié. Je n’aurai qu’un mot : pouah! Mais enfin, tant que ces fantaisies se déroulent entre adultes que cela amuse, après tout… Quoiqu’il en soit, il est certain que ce livre, entre ce qu’il peut avoir de pittoresque et de repoussant, ne laisse pas indifférent.

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Commentaires
H
si vous lisez "jour de souffrance" (récit, 2008), la vie de couple avec son mari [À partir de 1981, Catherine Millet partage la vie de l’écrivain Jacques Henric qu’elle épouse dix ans plus tard.] n'a pas été toujours facile - et son enfance/adolescence "une enfance de rêve" (récit, 2014) également...
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C
Des cochonneries ? Non : une cochonnerie. Vous avez bien fait d'acheter ça en occasion.
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