Lettre documentaire 499
APHORISMES DU SOLITAIRE par José CAMON AZNAR
choisis et traduits par Philippe Billé d’après Aforismos del solitario (1982).
(Page 24). La conscience règne, le subconscient gouverne.
(26). Sur la peau amère de l’homme, le chien lèche toujours une plaie.
(26). Les dieux grecs se contentent d’être beaux.
(27). Si tu es en avance sur ton temps, on ne te suit pas, on te poursuit.
(27). Le doute n’est rien d’autre que la certitude méditée.
(28). Parler ironiquement de la religion est aussi facile et lâche que de faire un carton sur un éléphant.
(31). Tout plaisir sans amour est vice. C’est pourquoi il peut même exister un vice de la charité.
(44). Idéal humain. Etre pauvre, mais pas au point que cela t’empêche d’avoir de la compassion envers les pauvres.
(45). Le meilleur tableau : celui qui nous donne, en même temps qu’une impression de réalité, la conscience de son artifice.
(48). Tout ce qu’offre le diable est à portée de main.
(55). Signe de maturité : quand tu découvres que le lieu commun est une vérité.
(57). Le bonheur est derrière ce coin de rue où nous ne tournons jamais.
(65). L’orgueilleux donne l’impression d’être toujours monté à cheval sur lui-même.
(67). Aime ton prochain comme toi-même : c’est-à-dire avec une certaine honte.
(67). Le cyprès crée autour de lui des cloîtres gothiques.
(84). J’aimerais connaître les paroles du chant des merles.
(87). Dieu a créé les substantifs. L’homme, les adjectifs.
(89). Méfie-toi des paroles qui ont besoin de musique pour atteindre ton coeur.
(90). L’imagination, c’est la raison en vacances.
(93). Oh, si la haine, comme l’amour, était monogame !
(94). Le message des morts, serait-ce leur terrible silence ?
(102). La figure biblique qui m’inspire le plus de compassion ? L’agneau que l’on sacrifie à la place d’Isaac.
(102). Les nuages passent dans le ciel comme les pensées dans notre âme.
(104). Ce qui sépare le bien du mal, ce ne sont pas quelques concepts, mais quelques siècles.
(104). Quand les couleurs veulent nous sauter dessus comme des animaux furieux. Ou quand elles sont enfermées dans la cage du dessin. Voilà les deux grands styles.
(105). Il y aura toujours ce que l’on appelle peuple, car il y aura toujours une bourgeoisie ratée.
(105). Servitude du sceptique : il ne doute pas de son doute.
(105). Pourquoi ne pas parler de la pollution des imbéciles, qui infeste le monde et le rend irrespirable ?
(107). La Nature lui présente un paysage. Et le peintre en tire l’âme de ce paysage.
(109). C’est seulement campé sur quatre pattes, que l’on peut avoir cet air tranquille des boeufs.
(110). Différence entre la Nature et l’Art. Dans la Nature, tu éprouves la tentation de contempler l’autre côté de la montagne. Dans la peinture, non.
(125). Le caractère est le squelette de l’âme.
[illustration : portrait de Camón Aznar par Guayasamin]