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Journal documentaire
20 juillet 2013

tragédie française

une_tragedie_francaise_tzvetan_todorov_9782020679206L'ami Baudouin faisant halte chez moi l'autre jour, chargé d'un sac de livres qu'il portait à sa vieille tante Emma Hüss, je me suis permis d'y regarder et d'en extraire à mon usage un petit volume qui m'attirait, Une tragédie française, été 1944 : scènes de guerre civile, par Tzvetan Todorov (édition de poche revue et corrigée en 2004 d'un titre d'abord paru dix ans avant). J'ai réussi à le lire cette semaine, et avec grand plaisir, dans les moments de répit que me laissait la conduite de mes affaires, principalement la surveillance des travaux de maçonnerie. Cela raconte un épisode de la fin de la guerre, la libération prématurée, le 6 juin 1944, de la ville de Saint-Amand-Montrond par les maquisards, puis leur battue en retraite avec prise d'otages, puis la réaction des Allemands et de la milice avec autre prise d'otages à leur tour, etc. Il y a au début quelques paragraphes indiquant toutes les dénominations des multiples groupes et sous-groupes de la résistance nationale et locale (on sourit en songeant que le Front national était alors le nom d'une organisation communiste) et cela semble d'abord si compliqué, que je me demandais si j'arriverais à suivre. Mais l'histoire s'avère ensuite tout à fait claire et lisible, du reste passionnante, avec maints rebondissements. Il faut saluer l'énorme travail qu'a dû requérir la reconstitution en détail des événements, à partir de multiples sources orales et écrites, publiées et inédites. J'ai apprécié en outre que l'auteur, malgré son attachement déclaré à la cause de la Libération, soit assez impartial pour ne pas cacher les fautes commises de part et d'autre. Dans cette affaire les deux camps, entraînés par leurs ultras et faisant passer leurs «idéaux» avant l'intelligence, rivalisent de bassesse morale par la pratique ignoble de la prise d'otages. Le livre met aussi en cause l'irresponsabilité d'actes de résistance perpétrés en sachant qu'ils entraîneront des représailles disproportionnées par rapport à leur utilité douteuse. L'opposition par moments, notamment pendant les négociations, se joue moins entre miliciens et maquisards, qu'entre excités et modérés. Si l'auteur dénonce les crimes des deux côtés, il rapporte aussi quelques beaux gestes, la fermeté de tel chef résistant ne tolérant pas que ses hommes se croient tout permis, ou la charité de soldats allemands donnant à boire à des captifs morts de soif. On aura compris que cette oeuvre n'est pas seulement celle d'un historien, mais aussi d'un moraliste, au regard désabusé : «Rien n'est plus courant dans la vie réelle que le mal impuni, le bien non récompensé». 

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Commentaires
C
J'achète (j'aurais volontiers mis un "like", mais c'est un peu plus compliqué ici que sur Facebook).
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