accents
Je suis né en Saintonge, où l'on a déjà un accent du "Nord", et j'y ai vécu mes quatre premières années, puis les trois suivantes plus au Nord encore, en Bretagne. Si bien qu'en arrivant à sept ans dans le Périgord, où je devais passer le reste de ma jeunesse, on entendait bien que je n'étais pas du coin, et mes petits contemporains m'ont traité plus d'une fois de "Parisien", ce qui n'avait rien d'aimable. Peu à peu j'ai pris le nouvel accent, sans m'en rendre compte d'abord, et sans tout à fait perdre l'ancien, de sorte que quand je parle, mes auditeurs sudistes me trouvent un ton nordique, et les nordiques un ton sudiste. Il m'est arrivé un peu la même chose lorsqu'à l'âge de vingt ans j'ai appris le portugais, langue à laquelle ne m'attachait aucun lien personnel ou familial préalable, et que j'ai étudiée en recevant à parts égales l'influence proprement portugaise et la brésilienne. J'en ai gardé un accent bâtard, qui semble portugais aux Brésiliens, et brésilien aux Portugais. Quelquefois ces questions d'accent m'ont gêné, mais ça n'a pas grande importance. Je me demande même si cet inconfort n'a pas fait de moi un meilleur linguiste, que si j'y avais échappé.